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IMPROV L’imagerie mentale comme outil de récupération des capacités sensorielles des professionnels du vin

Le projet de recherche proposé vise à optimiser des méthodologies d’entraînements olfactif et/ou gustatif afin d’aider à la récupération de l’acuité sensorielle des professionnels du vin suite à une altération due à des infections virales

2021 - RECHERCHE - Santé : IMPROV L’imagerie mentale comme outil de récupération des capacités sensorielles des professionnels  du vin
2021 | RECHERCHE - Santé

Date

Lancement : 2021

Informations

Porteur du projet : ADERA – Institut des Sciences de la Vigne et du Vin CENTRE CONDORCET – 162, Avenue du Dr A. Schweitzer – CS 60040 – 33608 PESSAC CEDEX

Signataire de la convention :

Correspondant technique : Sophie Tempère

Objectifs à atteindre

Ce projet a pour objectif principal de fournir aux professionnels de la dégustation des vins des outils d’entraînement olfactif et gustatif dans le cas de troubles sensoriels de type anosmie ou agueusie. Les protocoles proposés auront pour intérêt d’être pratiques et adaptés aux capacités sensorielles spécifiques des œnologues. Dans des travaux précédents (Tempere et al., 2014), nous avions démontré la capacité des professionnels du vin à manipuler des images mentales olfactives. Un entraînement basé sur cette capacité spécifique des professionnels de l’olfaction, peut leur permettre d’augmenter leur sensibilité d’une amplitude similaire à celle d’un entraînement par exposition répétée (Tempere et al., 2014) et peut s’expliquer par le fait que l’imagerie mentale partage des mécanismes neurophysiologiques avec la perception. Cependant, les conditions favorisant la création d’une image mentale olfactive ne sont pas connues. Notre objectif est de rendre le plus efficient possible ce type d’entraînement en précisant les consignes pour les sujets voulant suivre ce type, de protocole d’entraînement, actuellement basé sur des conseils empiriques ou laissé à l’appréciation des sujets. En fonction des possibilités de recrutement des sujets, ce travail pourra être étendu à la vérification de la faculté des experts à manipuler des images mentales gustatives, capacité qui pourrait être mise à profit dans la récupération d’éventuelles agueusies, perte du goût.

Résultats attendus

Ce projet est en lien direct avec la priorité n°1 (‘La santé’ – ‘Anosmie et Agueusie’) de l’appel à projet du Fonds de dotation conduit par les Œnologues de France et a pour but de mettre à disposition des œnologues des outils efficaces et simples de rééducation sensorielle dans le cas d’infections virales pouvant directement impacter l’exercice de leur fonction. La méthode novatrice proposée et que nous souhaitons affiner, met à profit la singularité de l’expertise des œnologues en tant que professionnels du sensoriel. Elle est la seule pouvant avoir une efficacité dans le cas de l’obstruction des voies nasales. La méthode de création d’images mentales olfactives ou gustatives pourrait avoir vocation et intérêt à être enseignée, mais peut aussi devenir un outil universel pour les métiers liés aux sens chimiques (œnologue, sommelier, parfumeur, cuisinier etc.). Ces travaux pourront donc conduire, dans les mois suivant le projet, à des communications et sensibilisations auprès des œnologues et des ORL qui les accompagnent en cas de troubles. En fonction des résultats obtenus, une valorisation sous forme d’articles scientifiques sur l’apprentissage de l’imagerie mentale olfactive et/ou de l’imagerie mentale gustative chez les œnologues devra être envisagée. 

Le projet de recherche proposé vise à optimiser des méthodologies d’entraînements olfactif et/ou gustatif afin d’aider à la récupération de l’acuité sensorielle des professionnels du vin suite à une altération due à des infections virales. Ce projet se déroulera dans le cadre d’un stage de Master 2ème année de 6 mois. Les problématiques perceptives rencontrées par certains professionnels suite à une infection virale ont été mises en lumière par la crise sanitaire de la COVID-19, bien que les causes de ce type de troubles puissent être multiples (Bonfils, 2020) et leur impact pour les professionnels sous-estimé (Bonfils et al., 2005). Dans le cas de la COVID-19, jusqu’à 86 % des personnes atteintes par le virus décrivent une perte de leurs performances olfactives (Lechien et al., 2020). Des pertes sévères de la perception gustative et/ou de la perception somesthésique (voie trigéminée) sont aussi rapportées(Parma et al., 2020). Ces pertes de l’acuité sensorielle ne semblent pas irrémédiables. Dans le cas de l’olfaction, elles semblent durer de 8 à 9 jours en moyenne, mais peuvent s’étendre à plusieurs semaines chez certains patients. Une étude utilisant des protocoles d’auto-évaluation (Gerkin et al., 2020), seulement 50% des sujets rapportent avoir retrouvé leurs capacités au bout de 40 jours. En outre, 10% des sujets rapportent une parosmie (le sujet sent le citron alors qu’on lui présente du café) ou des phantosmies (le sujet sent quelque chose qui n’existe pas dans son environnement - hallucinations olfactives) faisant suite à l’anosmie initiale (Parma et al., 2020). Ces troubles qualitatifs de l’olfaction pourraient cependant apparaître à plus ou moins long terme (Bonfils et al., 2005). La récupération fonctionnelle de l’olfaction n’est donc pas totale chez certains sujets, le traitement de l’information olfactive (donc des mécanismes centraux) peut avoir du mal à retrouver sa place. Dans ce contexte, on envisage très facilement le préjudice subi par les œnologues, dont le métier repose en grande partie sur la dégustation, s’ils sont confrontés à de tels troubles. Or on sait que des protocoles d’entraînement simples facilitent la récupération fonctionnelle de l’odorat dans la mesure où ils améliorent la sensibilité aux odeurs, leur reconnaissance et leur identification. Si l’exposition répétée à des odorants est le protocole de récupération le plus communément utilisé, conseillé aujourd’hui par les praticiens (ORL) et ayant montré une certaine efficacité sur le long terme, il présente quelques limites pratiques comme la nécessité de manipuler des odorants (huiles essentielles, arômes alimentaires, composés aromatiques etc.) et, évidemment, une inefficacité dans le cas d’obstruction des voies nasales. 2 Il se trouve que dans le cas de l’infection à la COVID-19, le système olfactif est en fait indirectement touché par l’inflammation des tissus de la muqueuse olfactive. Celle-ci entraîne la fermeture des étroites fosses olfactives qui portent la majeure partie de l’organe récepteur des odeurs, alors que la portion basse de la cavité nasale, moins exigüe, reste perméable, c’est-à-dire que, là, l’air respiratoire circule librement. Cette oblitération localisée de la voie aérienne ne permet plus à l’air flairé porteur d’odeurs d’atteindre et de stimuler directement les cellules réceptrices du système olfactif (Trotier et al., 2007 ; Eliezer et al., 2020). Même si le système nerveux olfactif est intact, l’odeur ne peut plus être perçue. Ce syndrome est connu dans d’autres affections (Chang et al., 2009). Afin de maintenir le système olfactif pendant cette phase inflammatoire, l’entrainement olfactif traditionnel par présentation de stimuli odorants n’est plus opérationnel. Il convient donc de trouver des méthodologies complémentaires pour entretenir les réseaux cérébraux impliqués par la perception olfactive, pendant la période où la réception est empêchée. A ce titre, mais aussi pour des questions pratiques, nous proposons dans ce projet de compléter notre travail sur l’imagerie mentale olfactive et son impact sur les capacités olfactives. Nous avons en effet déjà démontré que la capacité d’évocation mentale d’odeurs peut permettre d’augmenter la sensibilité et les capacités d’identification avec une efficacité similaire à un entraînement par exposition répétée (Tempere et al., 2014 – Article dans ScienceMag). Rappelons ici que l’imagerie mentale partage des mécanismes neurophysiologiques avec la perception réelle (Djordjevic et al., 2005). Cette capacité d’imagerie est dépendante du niveau d’expertise, (les experts sont plus performants que les novices) et de l’odeur ciblée. Cependant, les conditions favorisant la création d’une image mentale olfactive ne sont pas connues. Les préciser et les utiliser pourrait améliorer les consignes pour les sujets voulant suivre ce type de protocole d’entraînement, actuellement basé sur des conseils empiriques ou laissé à l’appréciation des sujets. Notre objectif est de rendre le plus efficient possible ce type d’entraînement. Ce travail pourra être étendu à la vérification de la faculté des experts à manipuler des images mentales gustatives, capacité qui pourrait être mise à profit dans la récupération d’éventuelles agueusies, pertes du goût. Bonfils P. (2020). Revue Française d’œnologie, mai/juin n° 299, p. Bonfils P., Avan P., Faulcon P., Malinvaud D. (2005). Archives of Otolaryngology - Head & Neck Surgery, 131, p. 107-112. DOI: 10.1001/archotol.131.2.107 Chang, H., Lee H.J., Mo J-H., Lee C.H., Ki J-W. (2009). Archives of Otolaryngology - Head & Neck Surgery, 135, 10, p.988-992. DOI: 10.1001/archoto.2009.140 Djordjevic J., Zatorre R., Petrides M., Boyle J.A., Jones-Gotman M. (2005). Neuroimage 24, 791–801. DOI : 10.1016/j.neuroimage.2004.09.035. Eliezer M., Hautefort C., Hamel AL., et al. (2020). JAMA Otolaryngology - Head & Neck Surgery, 146, 7, p. 674-675. DOI: 10.1001/jamaoto.2020.0832. Gerkin R.C. et al. (2020). MedRXiv (preprint). Lechien J.R., Chiesa‑Estomba C.M.et al. (2020). European Archives of Oto-Rhino-Laryngology. DOI: 10.1007/s00405-020-05965-1 Parma et al. (2020). Chemical Senses, bjaa041, https://doi.org/10.1093/chemse/bjaa041 Plailly J., Delaon-Martin C., Royet J.P. (2012). Human Brain Mapping, 33, p. 224-234. DOI: 10.1002/hbm.21207 Science Shot Brain & Behavior sur le site Sciencemag AAAS : http://news.sciencemag.org/brain-behavior/2014/12/how-sharpen-yoursense-smell-without-using-your-nose Tempere S., Hamtat M., Bougeant J.C., de Revel G., Sicard G. (2014). Journal of Sensory Science, 29, 6, 435-449. DOI: 10.1111/joss.12124 

Actions à réaliser

Dans un premier temps, les différentes expériences menées permettront d’évaluer l’impact de consignes spécifiques (conditions : flairage, attention, voire stimulations visuelles, etc.) sur la capacité d’imagerie mentale olfactive et son efficience sur le renforcement de la sensibilité. Différentes actions seront donc menées dans le cadre d’un stage de Master 2 Neurosciences : - Recherches bibliographiques sur les facteurs pouvant affecter la vivacité de l’image mentale olfactive (mois 1). - Préparation du protocole d’entraînement (mois 1). - Recrutement des sujets (experts/novices) et répartition dans les modalités expérimentales (mois 1 et 2). - Réalisation des mesures de sensibilité/capacité de détection dans le vin avant et après entraînement. Ces mesures pourront être accompagnées de questionnaires mesurant les capacités d’imagerie mentale des sujets (questionnaires validés et reconnus scientifiquement) (mois 3, 4 et 5). - Suivi individuel et journalier des entraînements (mois 3, 4 et 5). - Traitement des données et rédaction du rapport de stage (mois 6). Dans un second temps, en fonction des possibilités de recrutement des sujets, la capacité des sujets à réaliser une tâche d’imagerie mentale gustative sera explorée : nous tenterons de démontrer que les professionnels sont capables de manipuler mentalement des images gustatives. Le protocole proposé sera basé sur celui utilisé dans Tempere et al. (2014) démontrant l’effet d’un entraînement pas imagerie mentale olfactive sur la sensibilité. Les actions menées seront similaires à celles énoncées précédemment (mois 4 et 5 pour les passations). Le projet se définit d’abord comme un terrain concret de mesures. Il demandera la participation d’un nombre significatif de sujets (minimum 15) par catégorie d’expertise (œnologues et novices) et par modalité expérimentale. En priorité pour les experts, nous recruterons des œnologues, mais en cas de difficulté, notre recherche de sujets pourra s’ouvrir aux professionnels du vin possédant un diplôme ou une expérience forte en dégustation. Ces tests seront réalisés dans le respect des recommandations sanitaires en vigueur (passations individuelles ou distribution de tests à réaliser à la maison). Ce travail nécessitera le recrutement d’un master 2 en neurosciences sensorielles, l’achat de consommable (composés aromatiques et sapides marqueurs de la qualité des vins, flaconnage etc.) et pourra engendrer des frais de missions liés à des déplacements sur le terrain. L’encadrement de l’étudiant sera assumé par le Dr. Sophie Tempère (spécialiste dans domaine de la métrologie psychophysiologique et de l’apprentissage olfacto-gustatif) et le Pr. Gilles de Revel