Le marché des boissons issues de la désalcoolisation du vin est en plein essor au niveau mondial et peu de technologies sont aujourd’hui utilisables pour élaborer ce type de produit. Le défi technologique est en effet d’éliminer l’éthanol en conservant le profil aromatique du vin.
Lancement : 2022
Porteur du projet : Laboratoire de Génie Chimique 4 allée Emile Monso – 31040 Toulouse Cédex 4
Correspondant technique : Camy Séverine
Le marché des boissons issues de la désalcoolisation du vin est en plein essor au niveau mondial et peu de technologies sont aujourd’hui utilisables pour élaborer ce type de produit. Le défi technologique est en effet d’éliminer l’éthanol en conservant le profil aromatique du vin. Le dioxyde de carbone supercritique (sCO2) est un état du CO2 obtenu lorsqu'il est maintenu au-dessus de ses température et pression critiques (31°C et 74 bar) où la modularité de son pouvoir solvant permet d’envisager une première étape d’extraction sélective des arômes du vin suivie d’une étape d’extraction de l’éthanol et enfin une dernière étape de formulation du produit par réinsertion des arômes dans le liquide désalcoolisé. Le CO2 est une molécule biocompatible totalement acceptée dans l’industrie agroalimentaire et de nombreux exemples industriels utilisant le CO2 supercritique en attestent comme son application à la décaféination du café. Dans un domaine connexe au vin, on peut citer la très belle réussite de la société Diam Bouchage qui produit des bouchons en liège décontaminé au CO2 supercritique (suppression du risque de goût de bouchon). Le présent projet, d’une durée de 12 mois, a pour objectif de démontrer la faisabilité expérimentale des deux premières étapes : l’extraction sélective d’une première fraction constituée des composés aromatiques et l’extraction d’une seconde fraction comprenant l’éthanol. Les conditions de pression, température, taux de solvant permettant d’atteindre ces séparations seront déterminées pour chaque étape du procédé.
Les procédés utilisés pour la désalcoolisation du vin diffèrent en fonction de l’objectif recherché. La désalcoolisation partielle du vin préservant les arômes du vin a été proposée en utilisant la distillation sous vide, les contacteurs membranaires ou l’osmose inverse. En revanche, la désalcoolisation poussée (< 0.2% d’éthanol) s’avère plus délicate. Ce type de boisson à très faible teneur d’alcool est actuellement produit par distillation sous vide, soit par distillation sur colonne à garnissage ou en utilisant la technologie du spinning cone column (SCC), technologie qui s’est rapidement imposée dans la filière vitivinicole. On retrouve dans ce procédé les trois étapes déjà décrites. Ce procédé fonctionne cependant à des températures qui peuvent dénaturer les molécules extraites ce qui n’est pas le cas du CO2 qui est mis en œuvre à partir de 31 °C. Il apparaît que l’étape clé pour la qualité du produit final est la première étape de séparation des arômes puisque tout produit volatil non extrait et restant dans la phase aqueuse sera perdu dans l’étape 2 de désalcoolisation. L’utilisation du CO2 supercritique comme solvant est une alternative innovante, qui utilise de manière couplée deux principes de séparation, volatilité et affinité. Ainsi l’extraction au CO2 est-elle basée sur des principes physiques différents de ceux de la distillation et permet d’espérer obtenir un meilleur profil aromatique. Différents dispositifs expérimentaux dont dispose le Laboratoire de Génie Chimique (LGC) seront utilisés pour ce projet. Il s’agit d’une part d’extracteurs fonctionnant en mode semi-continu, permettant de traiter un volume défini de vin (de l’ordre de 200 mL) par mise en contact avec un flux continu de CO2 en conditions supercritiques, et d’autre part d’une colonne permettant de traiter en continu un débit de vin (1 kg/h) par mise en contact à contre-courant du flux de mélange liquide avec un flux de CO2 supercritique. Le premier appareillage permettra de déterminer les conditions opératoires appropriées pour chaque séparation. Le second appareillage permettra, dans les conditions opératoires déterminées dans la première étape, de vérifier la faisabilité de la séparation en mode continu. Notons que le laboratoire possède également des appareil semi-industriels (traitement de 25 L en discontinu ou de 20 kg/h en continu) mais dont on n’envisage pas l’utilisation dans ce projet exploratoire. La teneur résiduelle en éthanol du vin après chacune des deux étapes de séparation permettra d’évaluer la performance du procédé dans son ensemble et constituera les deux premiers indicateurs de performance du projet. Ces mesures seront réalisées par analyse chromatographique HPLC sur les appareillages du laboratoire. Le LGC dispose de la compétence dans ce domaine. L’efficacité de désaromatisation ainsi que l’efficacité de récupération des arômes seront évaluées par le suivi de marqueurs spécifiques du vin (une dizaine de molécules). Ces mesures seront réalisées par analyse chromatographique gazeuse couplée à la spectrométrie de masse sur les appareillages du laboratoire. Le LGC dispose de la compétence dans ce domaine. Ces analyses quantitatives constitueront le troisième indicateur de performance du projet. Les résultats préliminaires acquis dans le cadre de ce projet serviront de base à la rédaction d’un projet collaboratif impliquant d’autres partenaires universitaires et acteurs de la filière viticole, en particulier en région Occitanie. Un tel projet pourra faire l’objet d’une demande de financement auprès notamment de la Région Occitanie.
Le LGC est l’unique opérateur de ce projet. Le travail expérimental sera réalisé grâce au recrutement d’un stagiaire de niveau Master 2 en Génie des Procédés. Le planning de réalisation envisagé est le suivant : Phase 1 (2 mois) : Recherche des conditions expérimentales permettant la récupération sélective des fractions aromatiques du vin en mode semi-continu. Phase 2 (2 mois) : Recherche des conditions expérimentales permettant l’élimination de l’éthanol à partir de vin désaromatisé en mode semi-continu Phase 3 (2 mois): En fonction de la compatibilité des conditions expérimentales déterminées lors des phases 1 et 2 et des plages de fonctionnement de l’appareil continu, mise en œuvre du fractionnement en mode continu sur l’appareillage à contre-courant. L’équipe CO2 supercritique du Laboratoire de Génie Chimique (UMR 5503) est en place depuis 1997 et est une des rares équipes spécialisées dans cette technologie ayant la spécificité de pouvoir mener les études jusqu’à un développement pré-industriel, voire accompagner la/les entreprises jusqu’à la mise en place de l’appareil de production (exemple de l’oxydation de la cellulose en CO2 supercritique avec la société Sofradim à Trévoux, France, en 2015). L’équipe possède une expertise dans la conception et la modélisation d’unités de traitement de liquides en continu par CO2 supercritique, comme cela est envisagé dans ce projet.